Pourquoi pas Diaspora ?
Après notre annonce d'un prochain réseau social estampillé "made in m0le", certains nous ont demandé pourquoi nous n'avions pas opté pour le challenger Diaspora. Les explications valaient bien un petit billet.
Tout avait si bien commencé...
Diaspora. Ce nom évocateur ne dit peut-être rien à certains d'entre vous, mais il y a une poignée d'années, il a suscité beaucoup d'espoir chez ceux qui n'ont jamais aimé le pouvoir intrusif de Facebook. Moi le premier.
On est au printemps 2010 et quatre étudiants américains annoncent leur volonté de créer une alternative libre à Facebook. Ils ont bien compris que le principal danger du réseau social bleuté est sa centralisation des données.
Le fonctionnement de l'alternative, présentée grossièrement, est simple : chaque utilisateur héberge ses données sur un serveur propre et décide de ce qu'il veut partager et avec qui, un peu comme avec le système P2P.
Les quatre étudiants lancent une levée de fonds via Kickstarter pour un futur développement de Diaspora. C'est le jackpot : plus de 125 000 dollars sont récoltés en quelques jours. Signe indéniable que l'idée d'un réseau social décentralisé plaît et qu'un public est prêt à payer pour qu'il voie le jour.
Une éternelle version alpha
C'est à l'aube de l'automne 2010 que sort la première version de Diaspora. Jusqu'ici tout va bien, et le rythme de développement est assez optimal. Des invitations sont lancées et les plus curieux peuvent commencer les tests.
Le truc en plus de Diaspora, après ces premiers tests, ce sont incontestablement ses Aspects. Pour la faire simple, il s'agit de groupes ("Amis", "Famille", "Travail", "Programmeurs") dans lesquels on peut assigner plusieurs de ses contacts.
Du coup, quand vous voulez partager quelque chose avec seulement une partie de vos contacts, il n'y a rien de plus simple : il suffit de sélectionner le.s Aspect.s à qui c'est destiné !
Bien sûr, l'alpha est une alpha, et à part quelques centaines d'aficionados dont je fus, le bouche à oreille a du mal à fonctionner. Qu'à cela ne tienne, la machine est lancée, et la V1 devrait être maniable dès la fin d'année.
Janvier 2011, toujours rien. Bon c'est pas grave, sûrement un peu de retard, ce sera bon pour février. Ah, non ? Mars, peut-être ? En fait, en octobre 2011, soit un an et demi après la première levée de fonds, les quatre pères de Diaspora appellent encore à donner des sous.
Aïe, aïe, aïe. Surtout qu'entre temps....
Google+ encercle le concept d'Aspect
En juin 2011, soit un an et deux mois après l'annonce du développement de Diaspora, Google lance Google+. Déjà très sonné par le bide incomparable de Wave, le géant de Mountain View espère se remettre en selle sur le marché des réseaux sociaux.
La particularité de Google+ ? Être visuellement très proche de Facebook, mais en permettant de trier ses contacts en "Cercles" à qui l'on peut destiner tel ou tel message. Simple, facile, bien plus évident à manier que les listes Facebook d'alors.
Tiens, mais ça ressemble quand même pas mal aux Aspects de Diaspora... Mais trop tard, l'idée de filtre qui aurait pu être associé à un challenger libre est dans l'imaginaire collectif maintenant attaché à Google, qui n'est pas pour autant moins intrusif que son collègue bleu...
Un drame qui précède un abandon
C'est le 14 novembre 2011 que Diaspora annonce le décès d'Ilya Zhitomirskiy, l'un des quatre étudiants à l'origine du réseau social libre. Il avait 22 ans, et la police s'oriente vers la piste du suicide. Les atermoiements de Diaspora n'en seront évidemment que plus forts.
Quelques saisons plus tard, c'est en août 2012 que les créateurs lâchent la bête : Diaspora est maintenant un "projet communautaire". Mais il faut peut-être comprendre que ses créateurs préfèrent simplement arrêter les frais.
Un peu dommage, car un appel à l'intelligence collective avant l'arrivée de Google+ aurait peut-être permis de lancer une dynamique capable de sortir un réseau digne de ce nom avant la "nouveauté" de Google.
On ne peut désormais plus réécrire l'Histoire, et la moitié des créateurs de Diaspora se consacre maintenant à makr.io, un service de partage d'images libre.
Contrairement à Framasoft qui considère que cette ouverture du projet pourrait être sa planche de salut, je doute que le buzz suscité en 2010 se reproduise auprès de la communauté libriste. Le développement de Diaspora a été trop lent, et après l'heure , c'est plus l'heure.
L'estocade technique
Peut-être Diaspora est-il au moins assez simple à intégrer techniquement pour se propager ? Je répondrai en reprenant fidèlement le récent commentaire de Nono, qui avait tenté le coup sur m0le en août 2012 :
Dans un premier temps, l'engouement suscité par Diaspora commençait à disparaître (non pas diminuer, vraiment disparaître).
Et surtout qu'après quelques bonnes heures passées à (juste) essayer de lancer une instance, je devais me résigner : échec cuisant.
Des dépendances qui n'en finissaient plus, des docs qui se contredisaient entre les versions anglaise et française, les compatibilités et les versions de certains paquets Debian, voire source, à compiler : un Capharnaüm sans nom.
Bref, Diaspora, j'ai assez perdu de temps avec 🙂
Epilogue
Après avoir pensé à Jappix pour notre réseau social "made in m0le", nous penchons, grâce aux conseils de letroll (qu'il en soit encore remercié ;-)), vers Movim. Histoire à suivre, donc !
Comments
Comment by qwerty on 2013-06-29 15:32:59 +0200
Vive Movim, qui eux, sont actif !
Comment by letroll on 2013-07-02 22:23:41 +0200
Houla ! c'est faire beaucoup de cas de mon humble avis ! Je n'ai aucune prétention en la matière !
Je venais juste de me renseigner sur movim (excelente la vidéo de présentation lors de l'Ubuntu party).
Un autre bon point c'est qu'il est basé sur xmpp, donc ne réinvente pas la roue, est ouvert aux autres plateformes utilisant ce protocole et est extensible. Le seul point noir (à mon avis) c'est la migration de ses données qui n'est pas encore implémenté (si j'ai bien compris...).
Movim m'a l'air bien vivant effectivement, je pense que c'est un projet qui mériterait à être connu et utilisé !
Bonne continuation !
HS: ça fait un moment que je suis ce blog et j'aime bien les différents articles et auteurs, je me posais la question suivante : mais qui êtes vous ? pourquoi vous vous êtes lancé sur ce blog ? comment vous êtes vous connu ? qu'est-ce qui vous rassemble ? euh finalement ça fait bien plus d'une question... 😀
Comment by Raphi on 2013-07-03 20:03:11 +0200
Salut à toi letroll 😉 !
Pour répondre à ton HS, la majeure partie des rédacteurs de m0le est née dans le Sud de l'Alsace. Pour beaucoup, nous nous sommes rencontrés pendant nos deux années d'IUT, et ma foi on s'est dit un jour d'automne 2011 que se lancer dans l'aventure d'un blog commun pouvait être une bonne chose :-).
Aucun projet précis, juste une envie d'essayer et de voir ce que ça donnerait. Nous sommes passionnés par les TIC en général (avec des profils plus ou moins techniques) mais il n'y a pas de ligne éditoriale absolue, même si nous avons tous nos petites préférences (Dubstep pour Olivier, liens pour Nono, data pour ma part, etc...). Voilà en gros !
En tout cas merci pour les encouragements, ça fait vraiment très plaisir à lire !
Comment by Nono on 2013-07-04 09:02:22 +0200
Tiens, je vais le noter dans mon CV ca .. "Spécialiste en Lien" :p
Pour compléter sa réponse, pour la petite explication, je suis Admin Sys, je fais donc une veille quotidienne dans ce sens, et je suis aussi un amateur d'art à mes heures perdues. Mes liens sont plus une base de donnée de mes découvertes, et aussi un moyen centralisé de les partager aux plus grand nombre. (J'en avait marre de poster sur facebook).
Comment by letroll on 2013-07-08 17:36:45 +0200
Merci pour les réponses ! c'est sympa de partager vos centres d’intérêt/découvertes, continuez !
La ligne éditoriale me va parfaitement ;-p